N° 1849 DU VENDREDI AU VENDREDI 19 JUIN 2009
IMMOBILIER. Les Pièges du Robien
La plainte déposée par l’UFC contre le leader de l’investissement fiscal locatif montre les impératifs du placement qui valent, aujourd’hui, pour le Scellier ►p.29
CONTENTIEUX.Plainte de l’UFC-Que choisir pour tromperie contre le groupe Akérys, leader de l’investissement locatif
LA JUSTICE DE PLUS EN PLUS APPELEE A SANCTIONNER LES DERIVES DU ROBIEN
En annonçant, le 3 juin, qu’elle avait déposé une plainte pour tromperie à l’encontre du groupe immobilier Akérys,l’UFC-Que choisir jette une pierre de taille dans la marre de l’investissement locatif. « Les témoignages recueillis montrent que l’argumentaire fourni à ses commerciaux par la société présente l’avantage fiscal comme une certitude, explique l’association. Privés de loyers, des milliers d’investisseurs sont aujourd’hui incapables de rembourser les crédits qu’ils ont souscris pour financer leur projet et se retrouvent dans des situations financières délicates. »
De nombreuses plaintes.
La société mise en cause- qui poursuit l’association en diffamation- se déclare « particulièrement surprise par la plainte » et affirme que, sur un total de 30.000 logements livrés en cours des cinq dernières années, une cinquantaine seulement ont fait l’objet d’une requalification fiscale en raison d’absence de locataire et que, dans ce cas, « il lui arrive de procéder tout simplement à des résolutions de vente », moins de dix ayant été effectuées au cours de l’exercice 2008-2009, sur 5.531 logements qu’elle a commercialisé sur la même période.
Les « nombreuses plaintes » dont fait état l’UFC-Que- choisir, émanant « de consommateurs victimes d’abus de la part de promoteurs lors de la commercialisation de certains programmes immobiliers relevant des dispositifs de défiscalisation Robien ou Demessine », sont loin de mettre toutes en cause le seul promoteur cité. « Le système a été perverti par certains promoteurs qui ont construit dans des zones géographiques où les appartements ne pourront trouver de locataires en raison d’une offre surabondante » explique ainsi l’association.
En s’en prenant s’en prenant au leader français de l’investissement locatif, l’association affirme avoir voulu faire un exemple, et adresser un message de prudence à l’attention de tous ceux qui sont aujourd’hui sollicités pour investir dans un logement neuf.
Un autre opérateur important du secteur, OMNIUM FINANCE, ferait lui aussi l’objet d’une information judiciaire. La partie de bras de fer entre les investisseurs-les fameux « Robien de la colère » - et ceux qu’ils accusent de les avoir trompé ne fait sans doute que commencer.
Signe de temps, une association, l’Adim (Association dd défense des investisseurs et mandataires victimes des opérateurs indélicats de produits de défiscalisation), appelle les propriétaires en colère à une manifestation à Toulouse le 19 juin prochain !
Surtout, les dossiers de plainte s’entassent dans un certain nombre de cabinets d’avocats. Plusieurs investisseurs, qui ont porté l’affaire devant les tribunaux, ont d’ores et déjà obtenu, selon les cas l’annulation de la vente ou le versement de dédommagements.
Bien entendu, il ne s’agit pas de condamner l’investissement locatif en tant que tel. Ces déconvenues ne concernent qu’une minorité des 350.000investisseurs en Robien des cinq dernières années. La fédération nationale des promoteurs constructeurs évalue globalement les logements vacants six mois après leur livraison à moins de 2% des logements livrés (soit 4.500 à 5.000 logements). Reste qu’ils ne sont pas également répartis géographiquement. Une enquête de l’Agence départementale de l’information sur le logement du Tarn-et-Garonne réalisé à la fin de 2007 évaluait alors à 10% leur part dans le département.
Actuellement, seule une minorité d’opérateurs est mise en cause. Ils ont tous en commun de se spécialiser dans la commercialisation de « programmes fiscaux », vendus dans leur grande majorité comme des produits financiers – « plan d’épargne fiscale » est le terme couramment utilisé
-, le promoteur et ses filiales se chargeant de la recherche de locataires, de la mise en location et de la gestion locative, le tout assortit d’une garantie de revenu locatif qui permet de le présenter comme un placement sans risque.
Prohibez les achats à distance.
Les appartements, dans la grande majorité des cas, sont vendus à des investisseurs géographiquement éloignés des lieux d’implantation des programmes. N’ayant jamais vu le logement acquis autrement que sur le papier, ils sont entièrement tributaires de informations sur le marché locatif données par le vendeur. Dans un certain nombre de cas, elles se sont révélées erronées ou mensongères. Et pour les investisseurs, le rêve d’enrichissement a fait place au cauchemar du surendettement.
Pour ceux qui sont sur le point de succomber aux attraits des avantages fiscaux du nouveau régime Scellier, l’épisode a évidement valeur d’avertissement. Rien ne les protège contre les dérives, s’ils oublient que l’investissement locatif est d’abord un investissement en immobilier, que la seule garantie en la matière est dans la qualité de sa localisation, dans l’existence-durable- d’une demande locative, et que la seule façon de s’en assurer est de la vérifier sur place . Mieux vaut prévenir que guérir.
Patrick Augier
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